mardi 26 août 2008

Mon aube

Quand le soleil se lèvera sur mon aube à moi
Quand j'aurai rendu à la solitude et à l'amour
La place qu'ils n'auraient jamais dû quitter

Si j'avais sorti plus tôt de ma tête l'araignée
Trop souvent venue réclamer son dû

Si j'avais mis bas les flics sacerdotaux
Et leurs morales délétères

Si j'avais balayé le contrôle social
Et son carcan totalitaire

Alors, ils cesseront d'être malédiction et bénédiction
Cul de sac d'une vie et nirvana qu'à tout prix il faut atteindre
Alors, ils rejoindront les autres éléments qui fondent ma vie
Avec le même poids, la même importance, ni plus, ni moins
Toutes ces choses qui font de moi un être complexe, certes
Mais certainement pas malheureux
Comme on voudrait me le faire croire

Alors, je vivrai les différents chapitres de ma vie
Avec plus de sérénité et d'opportunisme

La solitude et l'amour apparaissant de ci de là
Dans la valse des paragraphes

Alors, mon horizon s'ouvrira sur un ciel bleu azur
Et ma vie prendra une toute autre allure
Bizarrement, à l'aube de mes 40 ans
Tout ça m'apparaît comme... si évident !




Y'en a marre !

Quand le soleil se lèvera dans notre système à nous
Avec un peu d'amour dans les outrages et qui n'en finissent plus de nous outrager
Depuis des millions et des millions d'années
Quand tous ceux à qui je pense et à qui vous pensez aussi
Quand ces autoritaires à la voix béante et aux chagrins absents
Quand ils croiront se lever dans la vertu du quotidien
Avec un peu d'horreur dans l'écriture et dans le parler bref
Quand tous ceux-là seront actifs présents indubitables
Alors nous leur ferons manger le destin le leur
Avec un menu de guerre bien entendu de notre guerre
Alors nous les ferons danser à notre manière
Avec des batteries somptuaires généreuses précises
Avec des voix de l'autre univers
Alors ? Alors ? Le pouvoir fera sous lui !

(Texte introductif inédit à "Y'en a marre" au TLP Dejazet en 1988)

lundi 28 juillet 2008

Quand Malo Cortese rencontre le Pauvre Lélian

...Mon El Dorado...

Je le cherche depuis si longtemps, allant d'espoir en déception. Je suis si fatigué de ne le trouver que je finis par ne plus trop savoir de quoi il est fait...

C'est peut-être une fable peinte sur une peau humaine, la peau d'un moine franciscain que les indiens Jivaro ont arrachée et qui se trouve cachée dans une île de Venise... Saint-François du Désert ?...

A moins qu'El Dorado ne soit une femme ? Mais oui, mon alter ego, mon alliée, celle qui se contente de m'aimer comme je suis, mon bandit d'honneur... mon inaccessible... un rêve familier...

Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.

Car elle me comprend, et mon cœur, transparent
Pour elle seule, hélas ! cesse d'être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.

Est-elle brune, blonde ou rousse ? - je l'ignore.
Son nom? je me souviens qu'il est doux et sonore
Comme ceux des aimés que la Vie exila.

Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.

Note : juste un petit arrangement de textes d'autres. Merci à Hugo et Paul en premier mais aussi à Bernard, Enki et Mathilda.

mercredi 21 mai 2008

J'voudrais pas crever avant d'avoir voyagé !

- Ola, mon ami ! Companeros ! Tu n'est pas sur la route ? Tu peux pas rester ici. Il faut que tu voyages, que tu vois du monde, que tu apprennes.
- Mais pourquoi faire ? Je suis bien ici. J'ai pas besoin de voyager. Tous ceux qui l'ont fait sont revenus en me disant que l'herbe n'était pas plus verte ailleurs.
- Qui t'as dit qu'il te fallait chercher herbe plus verte ? Si on te demande de partir, c'est pour mieux revenir. Ce n'est pas mener conquête ton but, c'est mener ta quête. "Der Weg ist das Ziel"(*) T'en souviens-tu ?
- Vaguement... Je suis si fatigué. Tu sais la vie et les gens m'ont usé. La sincérité ? Ca n'a pas payé. L'amitié ? Ca a plus que souvent capoté. Quant à l'amour, n'en parlons même pas. J'en ai trop marre d'avoir ces marées en dedans qui me font à chaque fois perdre l'équilibre. Je suis bien mieux au coin du comptoir, peinard, à endormir ma conscience dans les vapeurs d'alcool.
- Qu'est-ce qui se passe, mon ami ? D'où te viens cette désillusion ? Je t'ai connu plein d'espoir.
- J'ai l'araignée dans la tête qui vient me réclamer son dû. Elle vient remettre les pendules à l'heure. Il n'y a plus rien, mon pote ! Plus d'horizon, juste un mur avec rien derrière.
- Il n'y a de mur que celui que tu te construis toi même ! N'étais-tu pas de ceux qui choisissent leur avenir plutôt que de le subir ? de ceux qui ignore superbement la fatalité ? de ceux qui ne disent jamais qu'il n'y a pas de hasard et que tout est destin ?
- C'est vrai. J'étais l'un d'entre eux. Mais il est des moments de vie où je ne ressens que lassitude et aigreur. Des moments où je bascule dans le cynisme. Et j'ai bien peur de ne pouvoir en ressortir cette fois.
- Alors bouge-toi ! Voyage ! Pars ! Qu'est-ce que tu risques ? Rien de pire en tout cas. Puis des bars, y'en a partout. L'essentiel, c'est d'en changer de temps en temps histoire de faire des rencontres.
- Ouaip ! C'est vrai ce que tu dis. Tu sais quoi ? J'ai jamais rencontré Corto dans un bar même à l'Univers à Saint-Malo. Par contre, j'ai rencontré sa fille, une sacrée nana... inaccessible, bien entendu. Mais, bon, de toute façon, je ne cherche pas à y accéder. Puis, c'est dans un troquet que j'ai rencontré mon "parrain", un gars très bien qui m'a ouvert les portes d'un univers inconnu et porteur d'espoir.
Bon, allez, je finis celui-là. Je prends cabas et bâton et je file sur la route. A bientôt ! Mais, mon ami, seras-tu là à mon retour que je te conte mon carnet de voyage ?
- Evidemment que je serai là. Tu sais que je ne suis jamais loin de là où...


(*) "Le chemin est le but." (proverbe allemand)

jeudi 1 mai 2008

La vie par chapitres

"Moi, je vis ma vie par chapitre.", me disait récemment une charmante interlocutrice. Que voilà une manière de voir qui ne me déplait pas!

Ainsi, nous passons de chapitre en chapitre, n'en ouvrant un nouveau que parce que l'on a clôturé le précédent. Quoique... certains d'entre eux résistent à leur conclusion. Ils ont alors une méchante tendance à venir perturber celui en cours nous obligeant à user d'autorité en leur donnant une fin bien souvent quelque peu brutale.

Les chapitres se succèdent ainsi pour former un livre dont nous n'écrirons jamais l'épilogue car, après le dernier chapitre, nous n'écrivons plus.

Et puis, les chapitres des autres viennent se mêler aux nôtres.

Du coup, les lignes se mélangent, s'entremêlent, s'entrecoupent, s'enlacent, se confondent, se fécondent mutuellement ; les mots deviennent dessins, les dessins peintures qui se brouillent progressivement. Le flou s'installe puis se dissipe pour laisser à nouveau la place aux mots.

Tout ces livres entrelacés par bribes de chapitres forment alors un grand livre qui ne se terminera vraisemblablement jamais.

Mais sois assurée, très chère interlocutrice, que je n'écrirai rien dans un de tes chapitres sans ton explicite autorisation.


Images : Stella Im Hultberg, "High over yonder" et "Can't disappear"

jeudi 10 avril 2008

La fille de Corto

Tu parles à nouveau de partir.
Du coup, je me dépêche de t'écrire...
T'écrire des mots qui risquent bien de parler à ton coeur.
Tant pis ! Cette fois-ci, je fais fi de cette ridicule pudeur,
Qui a tant de fois cloîtré ce que j'avais pour toi dans mon coeur.

Tu parles de partir et moi je n'ai qu'une envie : te retenir.
Pourquoi joues-tu la fille du vent ?
Est-ce un besoin de fuir ?
Ou serais-tu la fille de Corto Maltese ?
"Tu pars ?"
"Je suis bien obligée... Je ne suis pas de celles qui prennent racines."

Tu parles de partir et moi je n'ai qu'une envie : te retenir.
Mais comment ? Je ne suis ni ton mari ni ton amant...
Juste un anonyme derrière la foule des prétendants.
Vendre en échange mon âme au Sheitan ?
Quand je le sonne, il est aux abonnés absents.
Te kidnapper et t'enchaîner ? Impossible !
Enfermer une féline, autant la tuer.

Tu parles de partir et moi je n'ai qu'une envie : te retenir.
Qu'ai-je bien pu faire pour mériter telle déchirure ?
Je m'étais habitué à ce sourire enjôleur.
Celui que tu me lançais vers cinq heure.
Et ces yeux que j'ai appris à lire
Où j'ai vu tour à tour
Rage et tristesse,
Bonheur et tendresse,
Sourire et complicité.

Tu parles de partir et moi je n'ai qu'une envie : te retenir.
Que faut-il faire pour que tu restes ?
Sacrebleu, qu'on me le dise !
Et j'agirai preste !

lundi 24 mars 2008

A Samuel, l'Intrépide !

Toi qui ne remplit pas encore la main de ton père
Et qui te demandera plus tard à l'instar de cette mère
Venue sur la tombe de sa fille au fin fond du Missouri
En se demandant ce qu'elle avait bien pu trouver à William Munny
Ce qu'il pouvait bien avoir à faire
Avec ce Charlie, ce pauvre hère
Calé, là-bas, en contrebas d'un terril dans cette Belgique humide
Là où l'industrie certains jours laisse dans l'air une odeur fétide
Alors tu l'interrogeras
Et il te racontera
Ces soirées d'anthologie
Où l'on profitait jusqu'à la lie
De notre amitié.
Ces soirs-là...
Dédé tapissait le fond de sa vieille gamelle d'un Herve bien fait,
Panda scrutait les étoiles - paraît qu'elles sont rudement bien foutues! -,
Fouine s'épanchait sur les mérites de ce bon vieux vinyl,
Pauline se blottissait un fois son pousse en main dans un plaid,
Ta maman scrutait le moindre "nègre" qui oserait sortir d'une bouche,
Anne-Takerine à cette heure pâle de la nuit ne disait plus grand chose,
Stéphane se resservait de cet excellent whisky amené par un convive averti,
Isabelle se demandait s'il était bien raisonnable d'en reprendre un,
Ton père s'éveillait de sa sieste coutumière, les narines titillées par le fumet du fondant,
Moi, je buvais, je réfléchissais ou divaguais, généralement les trois je faisais.
Tout cela, mon bon Sam, n'a rien avoir avec la nostalgie,
C'est juste des moments essentiels de vie !

vendredi 7 mars 2008

Garçon ! Un peu d'Villon, SVP !

Je plains le temps de ma jeunesse (extrait)

Bien sait, si j'eusse étudié
Du temps de ma jeunesse folle
Et à bonnes moeurs dédiés,
J'eusse maison et couche molle.
Mais quoi ! Je fuyais l'école,
Comme fait le mauvais enfant.
En écrivant cette parole,
A peu que le coeur ne me fend.

Ballade de bonne doctrine à ceux de mauvaise vie

Car ou soies porteur de bulles,
Pipeur ou hasardeur de dez,
Tailleur de faulx coings, tu te brusles,
Comme ceulx qui sont eschaudez,
Traistres parjurs, de foy vuydez;
Soies larron, ravis ou pilles:
Où en va l'acquest, que cuidez?
Tout aux tavernes et aux filles.

Ryme, raille, cymballe, luttes,
Comme fol, fainctif, eshontez;
Farce, broulle, joue des fleustes;
Fais, es villes et es citez,
Farces, jeux et moralitez;
Gaigne au berlanc, au glic, aux quilles.
Aussi bien va -- or escoutez --
Tout aux tavernes et aux filles.

De telz ordures te reculles;
Laboure, fauche champs et prez;
Sers et pense chevaulx et mulles;
S'aucunement tu n'es lettrez;
Assez auras, se prens en grez.
Mais se chanvre broyes ou tilles,
Ne tens ton labour qu'as ouvrez
Tout aux tavernes et aux filles.

Chausses, pourpoins esguilletez,
Robes, et toutes voz drappilles,
Ains que vous fassiez pis, portez
Tout aux tavernes et aux filles.

mardi 4 mars 2008

Morphée & Rimbaud

Je m'enfonce sous l'édredon. Je ne trouve pas le sommeil. Alors, je rive solidement les écouteurs dans mes oreilles, sélectionne l'envoûtant "The End" des Doors et me plonge dans l'univers rimbaldien. De page en page, de versets en vers et de vers en versets, j'avale avec une certaine frénésie. Je passe de la page 12 à la 245 puis la 50 puis la 101 retour à la 12 puis table des matières, des titres me parlent, j'y vais, j'y cours, volent les pages...

Je cale soudainement sur 4 lignes.

Morphée est là, sourie à Arthur, me gratifie d'un regard doux et rassurant. J'ai juste le temps de transmettre les 4 à ma Préférée qui les trouvera demain en allumant son portable. Pas sûr qu'elle y sera sensible : les réveils n'ont souvent rien de poétique pour une maman.

Ca y est. Mes paupières descendent lentement. Je m'endors en paix pendant qu'ils devisent gaiement. Tient, Jim les rejoins...

A quatre heure du matin, l'été
Le sommeil d'amour dure encore.
Sous les bosquets l'aube évapore
L'odeur du soir fêté


Image de Morphée tirée de la couverture du "Labyrinthe de Morphée" de YUKA Suzuki (dessinateur) et MORI Hiroshi (scénariste) aux éditions du Soleil.

samedi 12 janvier 2008

Self Pity

I never saw a wild thing
sorry for itself.
A small bird will drop frozen dead from a boug
h
without ever having felt sorry for itself.


D.H. Lawrence